22 août 2018 - Pakistan, Peuples et fêtes, Himalaya et Inde

Le peuple kalash habite des vallées isolées au cœur du massif de l’Hindu Kush, avec des traditions animistes singulières au sein d’une région à immense majorité musulmane. L’ethnologue Jean-Yves Loude présentera une exposition en leur honneur au Musée des Confluences de Lyon du 24 octobre 2018 au 15 octobre 2019. Sur les traces de Jean-Yves Loude, qui a consacré une partie de sa vie au peuple kalash entre 1978 et 1990, Barbara Delière  accompagnera en décembre 2018 un voyage d’immersion chez les kalash lors de leurs festivités annuelles de Chaumos, qui se déroulent sur deux semaines avant le solstice d’hiver. C’est pour elle aussi l’occasion de nous raconter comment elle est devenue une passionnée du peuple kalash et de revenir sur ses derniers voyages.

Qui sont les Kalash ?
Le Pakistan est un pays à immense majorité musulmane, et malgré cela ce peuple kalash, fort de seulement quelques milliers d’âmes, continue à exister dans des vallées isolées du massif de l’Hindu Kush avec des traditions animistes singulières. Au lieu de disparaître il y a même une sorte de renouveau culturel, mais le mode de vie des Kalash est cependant menacé par plusieurs facteurs liés tout autant à l'islamisation rampante qu'à la forte évolution du monde moderne. C'est ainsi une chance de pouvoir aller encore à leur rencontre de nos jours dans de bonnes conditions.
La culture des Kalash se base sur une tradition orale et une religion mettant en scène les fées, les esprits et les dieux. Ils continuent toujours à vivre en respectant la nature et le cycle des saisons. Ainsi, ce sont quatre festivals qui sont célébrés au cours de l’année, et le Chaumos correspond quant à lui aux derniers jours avant le solstice d’hiver. Nous sommes déjà partis en mai 2016, 2017 et 2018 à la rencontre des Kalash lors de leur festival Joshi de printemps, et le referons en mai 2019, mais ce sera la première fois pour le Chaumos en décembre 2018.

 

Exposition de Jean-Yves Loude sur les Kalash à Lyon
L’un des plus grands spécialistes du peuple kalash est l’ethnologue Jean-Yves Loude, qui a effectué huit longs séjours chez les Kalash entre 1978 et 1990 avec sa compagne Viviane Lièvre.
Nous avons l’honneur et le plaisir de vous annoncer que Jean-Yves Loude présentera une exposition consacrée au peuple kalash au Musée des Confluences de Lyon du 24 octobre 2018 au 15 octobre 2019. Le titre de l’exposition est « Fêtes himalayennes, les derniers Kalash ». Jean-Yves Loude leur a consacré quatre livres et une douzaine d’articles à raconter leur vie, leurs traditions et leur chamanisme, et ces livres seront réédités à l’autonome pour l’occasion.

  

Qu’est-ce que le Chaumos ?
Le festival de Chaumos correspond aux derniers jours avant le solstice d’hiver qui symbolise la fin d’une année, la fin aussi des récoltes et tout doit être alors consommés, partagés entre tous, pour repartir de plus belle avec la promesse d’une nouvelle année récompensée par la nature et aussi par les prières envoyées à Balumain, le dieu résidant au « Tsyam », terre d’origine des Kalash. Balumain vient une fois par an sur son cheval dans les vallées de Rumbur et Bumburet pour recueillir les vœux de plénitude et de bien-être.

Avec le Joshi, qui a lieu au printemps, c’est la plus grande cérémonie du peuple kalash. S’il y a moins de monde et de touristes pakistanais et autres, le Chaumos reste pour eux la fête la plus importante : c’est donc une chance de pouvoir y assister et vivre ces instants de joie où les cœurs et les voix s’expriment mêlés aux pas de danses et aux sourires nombreux, des moments tout simplement uniques !
Cette culture si atypique, nous ressemble en fait beaucoup. Manger, boire, danser et chanter, des modes et des habitudes qui ne sont pas sans rappeler les nôtres, où pour remettre plus de justesse, un mode de vie à l’époque de nos grands et arrières grands-parents. Une époque où l’on vivait tous ensemble sous le même toit, en famille, pour mieux s’entraider et travailler la terre, pour bien vivre, car la terre comme la famille sont pour les Kalash comme beaucoup de peuples isolés, encore les uniques et plus belles richesses...

 

Voyage spécial festival de Chaumos du 05 décembre 2018, avec Barbara Delière
Au cours de ce voyage, nous faisons une vraie immersion de 12 jours, ce qui est beaucoup, et comme beaucoup de festivités ont lieu le soir, il y aura pas mal de temps morts durant les journées. Ce n’est pas un voyage itinérant avec des découvertes variées au fil de la progression, mais une longue immersion durant laquelle on se concentre sur la rencontre avec le peuple kalash et la compréhension de leur culture profonde et des enjeux qui se posent à eux. Toutes les cérémonies religieuses sont accompagnées par des danses et des chants rythmés par le battement de tambours. Les femmes parées de leur robes noires traditionnelles, ornées de coquillages et de colliers colorés, dansent en cercle. Puis les hommes se joignent à elles.
Certaines cérémonies ont lieu en journée mais d’autres en soirée. Il y a des rituels qui sont réservés aux hommes et d’autres aux femmes, nécessitant parfois la séparation du groupe.
Nous atteignons les vallées Kalash depuis la ville de Chitral, dans l’Hindu Kush, où nous arrivons par la route depuis Peshawar en passant par la vallée de Swat.
En extension, nous vous proposons de découvrir des régions plus proches de l’Inde avec des vestiges de la dynastie moghole, du côté de Lahore, Multan, Bahawalpur et le désert de Cholistan.

Barbara Delière, passionnée du peuple kalash, accompagne ce voyage
Barbara a rencontré les « infidèles du Pakistan » comme certains les nomment, lors de sa traversée de l’Himalaya à pied en 2008-2009 à la rencontre des hommes, et des femmes en particulier, vivant sur les cinq pays traversés alors. Cette superbe traversée s'appelait "parler d'elles".

L’Himalaya depuis, ne la quitte plus et elle a toujours gardé contact avec le peuple kalash dans l’espoir de revenir.
En 2016 sa décision prise, elle retrouve une première fois ses amis kalash et pakistanais en juin et juillet 2016, pour faire un état des lieux devant la situation qui a bien changé en 8 ans. Un retour qui la pousse alors à revenir et rester auprès d’eux pendant un mois en décembre 2016, pour vivre l’expérience de l’isolement et de l’introspection lors du Chaumos où les festivités subliment le solstice d’hiver, période du renouveau d’un cycle éternel…

" Me voilà alors, ici et là-bas pour mieux comprendre et témoigner de leur situation et l’évolution de leur culture devant les changements qui s’opèrent. Des changements liés aux tensions devant une pression grandissante des forces religieuses en présence et devant des générations qui se mélangent et s’interrogent. Mais aussi, au besoin d’une reconnaissance plus grande de leur culture si particulière avec le développement du tourisme local : tout cela prend place au tournant d’un monde qui ouvre d’autres perspectives, pour le meilleur comme le pire…"

 

Retour sur les derniers voyages de Barbara, notamment avec des voyageurs de Tamera
" En 2017, comme en 2018 il y a quelques mois seulement, après avoir visité Islamabad puis pris la route par le long et spectaculaire col de Lowari à 3 100 m d’altitude, nous arrivions à Chitral, capitale du massif de l’Hindu Kush et de la région du nord-ouest pakistanais, le long de la frontière afghane. Point de départ pour retrouver la vallée de Bumburet où nous resterons logés en hôtel et en guest house, la majeure partie du temps
Des visites à Rumbur et Burmburet pour voir que les traditions se vivent différemment selon les vallées. Partout les genêts et leurs fleurs jaunes décorent les maisons, les femmes se font belles et les enfants sont pleins de dynamisme. Difficile de pouvoir être partout et au bon moment, mais nous avons pu assister à diverses coutumes, celles prévues, avec un public impressionnant, une masse dont l’enthousiasme est à la fois jouissive et oppressante, et d’autres de manière beaucoup plus intime"
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Grace à mes contacts et ceux qui vivent ici, nous verrons le « shishao » : la purification des femmes se fait souvent en petit comité, nous serons aux premières loges pour la purification des nouveaux nés au lait de chèvre frais et purifié. Dans ces lieux c’est ainsi, il faut savoir prendre le temps, vivre au rythme de ses habitants pour apprécier toutes leurs connaissances et leurs histoires.
Que de moments partagés avec kalash et musulmans, tout le monde est accueillant, comme toujours au Pakistan. Pas de problème de sécurité, avec une organisation qui fait plus qu’il n’en faut pour assurer que tout se déroule sans heurts. Un bien qui fait « du mal », car depuis les désastres survenus jusque 2014, l’armée et les forces de police interdisent toutes randonnées hors de la route principale et imposent d’être accompagné et logé dans des hébergements de tourisme. Des limites à la découverte qui n’empêchent pas de partager la vie des kalash, dont la porte et les coutumes sont toujours ouvertes aux touristes étrangers.
N’empêche, une évolution se fait et se fera pour que petit à petit nous ayons la chance de (re)découvrir les beautés et les multiples richesses qu’offre cette région et tout le reste du Pakistan.
A nous d’accompagner les habitants qui veulent avant tout que l’image médiatique déplorable de leur pays ne soit plus celle qui prédomine, mais plus celle, positive, des voyageurs qui s’aventurent sur leurs terres. Le mieux pour cela n’est-il pas simplement d’aller à leur rencontre ?

  

Je continue à entretenir encore et toujours un lien avec mes amis kalash, même de loin et à mener des projets qui prennent forme en 2018. En attendant je suis ravie de pouvoir travailler en partenariat avec Tamera qui est l’unique agence à proposer de telles rencontres, riche de sens et d’humanisme et de proposer avec eux ce magnifique voyage du 05 au 23 décembre 2018 pour assister et célébrer le Chaumos avec les habitants des vallées de Rumbur, Bumburet et si cela est possible, également Birir. Nous serons logés en guest house (tenue par des kalash), qui seront notre cocon et repère pour le séjour, car l’objectif est de partager des moments forts, des journées, et des soirées surtout, rythmées par les cérémonies et les préparatifs.
La journée sera plus calme car c’est vraiment la nuit que la fête prend forme. Nous pourrons alors aller à l’école avec les enfants, assister aux cours, aux repas (préparation du « djaou », le fameux pain aux noix), faire la toilette des habits, porter la robe et tenus traditionnelle et pour celles qui le désirent nous pourrons aller dans le Bashali, lieu où se retrouve les femmes pour les accouchements et pendant la période de règles (interdit aux hommes), mais alors il faudra se laver entièrement ainsi que les habits avant d’en sortir !

 

En somme s’imprégner de l’ambiance au sein des maisons traditionnelles et au cœur de la vie des kalash, tout en respectant des règles de bonnes conduites (comme lors de prise de photo, qui peuvent être gênante pour certaines, voir « agressive »), le temps alors passé ensemble sera vraiment plus propice à ce regard photographique, un regard plus humain !
Ainsi, pour que cela soit le plus en accord possible avec leurs valeurs et leur intégrité, nous aurons cette année la chance d’avoir mon ami Zarin, un habitant kalash vivant à Anish et travaillant à Chitral pour le développement touristique de la province du Kyber Pakhtunkhwa (KPK, anciennement la province du Nord Ouest du Pakistan) qui m’assistera comme guide local. Une vraie porte d’entrée pour pouvoir passer plus sereinement les règles administratives et les décisions de police, et surtout interroger les plus anciens sur leurs visions, leurs connaissances, leur histoire, en plus de cette jeunesse espérant un avenir meilleur.
Et bien sur, nous ferons les purifications, hommes et femmes séparés comme le veut la tradition et veillerons avec eux, avant d’aller sur la place ou à travers chaque maison pour danser, chanter et les voir vivre avec passion et joie ces moments si importants et sacrés.
Une aventure qui rassemblera, locaux, kalash, musulmans et voyageurs de divers horizons, tous avides de découverte et de connaissance, un moment rare à vivre, pour faire en sorte qu’ensemble, on n’oublie pas et continuons de réinventer l’histoire
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