09 mai 2018 - Afrique, Éthiopie

La route est difficile, se muant souvent en pistes cabossées, les paysages sont immensément splendides déroulant sur l’horizon hautes forêts et savanes vallonnées et les voyageurs qui aiment l’aventure roulent ainsi vers le Pays des Surma, là-bas, dans l’Ouest Sud de l’Éthiopie, à la rencontre d’un peuple peu connu et surprenant.  Nous découvrons leur quotidien avant de traverser l’Omo pour gagner l’autre rive où vivent d’autres ethnies pastorales : Hamars, Karos, Dassanetch… Éblouissement des parures et de la peinture des corps, vive animation des marchés odorants, beauté des cases qui nous parlent d’un monde ancré dans le déplacement et le soin des troupeaux.

 

Des nomades, des troupeaux …

 

L’Omo, fleuve immense et puissant mais parfois languissant entre ses îles de fortune partage leur territoire jusqu’au delta du Turkana.  Ses crues fertilisent les sols, créent des éco-systèmes diversifiés  et, pour les peuples de ses berges, il est ressources et magnifique. Grâce à lui, les troupeaux ont pâture et eau tout au long de l’année, même lors des sécheresses que connaît cette région semi-aride. Car, ce qui importe principalement aux semi-nomades que sont les Surma, les Hamars, les Galeb… c’est le bien-être de leurs bêtes, zébus, vaches, chèvres. La richesse se compte en têtes de bétail, la fierté s’adosse à la bien-portance des bovins. Aussi, le quotidien et les mois sont rythmés par les soins, les marches en quête de pâturages, les nuits dans la savane au milieu des troupeaux. Les jeunes gens aiment s’éloigner des leurs et des cases de longs temps pour s’initier à être « gardiens de troupeaux » et mener une vie libre et sommaire sous l’immense ciel et les étoiles. Ils vivent en symbiose avec les bovins dont ils boivent le lait et le sang auxquels ils dédient chants et poèmes. Le troupeau : l’alpha et l’omega de ces peuples de l’Omo.

Découvrez la grande variété des peuples de l’Omo

 

Le Donga et l’Ukuli

© P. Badzinski

La vie est ordonnée à plusieurs rites initiatiques, de l’enfance à l’âge adulte, car il faut marquer les passages, fêter les avènements aux cycles d’existence ou les valeurs qui permettent de vivre dans une nature belle mais souvent aride. Ainsi les Surma sont-ils réputés pour leurs Donga, une rude lutte aux bâtons où les jeunes gens font montre, sous le regard des belles et des tribus, de leur agilité, de leur force, de leur courage… Impressionnante cérémonie traditionnelle, chorégraphie sauvage et surprenante, dans l’atmosphère exaltée de la rencontre, le Donga montre la valeur de ces guerriers aux corps enduits de pigments, décorés de bandelettes multicolores, terriblement adroits dans le maniement du très long bâton (donga) qui sert au combat. Sur l’autre rive, le rituel de l’Ukili est le fait des Hamars. Les jeunes gens y deviennent des hommes ayant droit à fonder une famille et à posséder un troupeau par le saut de vaches ; danses, chants des femmes précèdent l’épreuve dans une ambiance festive non dénuée pourtant de brutalité car les jeunes filles valeureuses se flagellent  pour donner du courage aux garçons qu’elles admirent ; pour elles, les cicatrices profondes qui cisaillent leur dos sont des marques de fierté.

Pour un voyage hors du temps

 

Une vie quotidienne et des parures

La vie quotidienne de ces peuples, au sein de la nature, est consacrée aux gestes essentiels de la vie et aux palabres. Tandis que les hommes s’occupent des troupeaux et des cultures éloignées, les femmes se vouent aux travaux de « la maison » : réparation des cases, préparation des repas, soins aux enfants…  Les animistes du sud éthiopien n'ont pu développé une culture matérielle comparable aux merveilles de l'Abyssinie mais, leur univers symbolique est d'une extrême richesse et d'une grande variété: peintures corporelles, scarifications, coiffes de plumes, bracelets et colliers, labrets... parlent du clan auquel on appartient, du guerrier que l'on est, de l'épouse que l'on peut devenir, etc.  La majorité des ethnies font preuve d’une créativité picturale vertigineuse: les corps et les visages sont peints avec un art consommé et une connaissance entière des matières, des textures, des couleurs, des formes. Que le but soit d'exprimer la bravoure ou de la renforcer, de séduire, de se protéger contre les esprits, d'intimider l'adversaire dans les luttes, de fêter les récoltes, l'art de se peindre et de dessiner est porté à son comble par les uns et les autres et constitue un lien social indéfectible pratiqué par les enfants dès le plus jeune âge.  Les chairs incisées, les chairs peintes, les têtes parées: ainsi se portentt, dans les basses régions de l'Omo, à même les corps presque nus, les informations majeures à se transmettre dans les rencontres.

Pour s’immerger dans la magnifique contrée de l’Omo